mardi 22 mars 2016

Les élèves de la cinquième 1 s'intéressent au temps

Dehors les bourrasques de vent s'enchaînent
Les piétons irrités passent à la chaîne
Et la télé attend avec ses chaines

Je rentre en craquant la porte qui coince
Je jette mon cartable au contenu mince
Je m'étend sur le canapé qui grince

J'allume et mon regard est attiré
Vers une chaîne de télé-réalité
Sur un paysan et son champs de blé

En été il doit faucher
En automne il doit semer
En hiver il doit veiller sur le blé
Mais maintenant la fatigue me lance

Meryem BOURASS. 5ème 1.

Des saisons, laquelle manque ?


Les saisons n’ont pas le temps de perdre leurs talons
Et la nature n’a pas envie de perdre ses saisons
L’hiver fabuleux malgré son brouillard
L’automne ennuyeux se presse à faire voler les foulards
Par les soirs bleus de l’été, j’irais sous les pommiers en fleur
Savourant mon bonheur  éternel durant la saison des couleurs

                       Abdelmoughit KRAFESS    5ème 1

La vie selon Lina

LA VIE

La vie est comme la mie d'un pain
Je me demande aussi pourquoi
Je ne vivrai pas sous un toit

Je suis toute seule, mélancolique
À penser à ma vie pathétique
Comme si j’étais dans du foin

Lina LGHALI  5ème1.

lundi 14 mars 2016

Après la lecture du roman Eldorado de Laurent Gaudé, il s’agissait d’écrire, à partir d’une photo, un récit avec un point de vue interne. Classe de Madame BAROUX.


TEXTE 1,


Il faisait nuit. Nous étions prêts à quitter la maison. Cette maison qui nous avait tant rassemblés et où nous avions passé nos meilleurs moments. En passant de l'autre coté de la porte d'entrée, nous n'étions pas seulement en train de faire nos adieux à nos chambres, à notre cuisine ou à notre petit salon modeste, mais nous étions en train de tout abandonner. Je contemplais le journal encore posé sur la table, la tasse de café à moitié pleine. Le feu était encore allumé depuis l'après midi. Le silence régnait et seul le bruit des aiguille de l'horloge accrochée au mur comblait ce silence et nous rappelait que le moment tant attendu était arrivé.
Il était temps de partir, de quitter la Syrie, de quitter Damas, de quitter notre petite maison. La situation en Syrie était devenu trop critique depuis quelques années maintenant. Apres plus de trois ans de conflit armé, la guerre civile faisait rage aux quatre coins du pays. On comptait des milliers de morts, hommes femmes et enfants innocents, des milliers de blessés ainsi que de nombreux foyers détruits. Dans un pays en ruine, des millions de personnes étaient déracinées. C'était notre cas. Nous étions prêt à quitter damas afin d'atteindre la Grèce et espérer par la suite atteindre l'Europe.
Nour et Alya pleuraient silencieusement. J'étais autant bouleversé mais je ne devais pas le leur montrer. Nous étions sur le point de quitter le pays, fuir la guerre, mais nous étions ensemble. Nous avions survécus aux bombardements, aux tueries et étions prêt à rester unis afin de tout dépasser. Ce que j'espérais le plus c'était seulement de donner à ma fille Nour la chance d'avoir une meilleure vie. Elle qui est née dans un contexte de guerre
n'avait jamais eu l'occasion de connaitre le bonheur. L'Europe était pour nous cet échappatoire qui allait tout changer. Sa mère et moi étions prêts à travailler, dur, très dur une fois là-bas. Nous étions prêt à tout sacrifier pour qu'elle ait la vie que mérite chaque enfant.
Le téléphone sonna, c'était Ahmed. Je pris du temps pour répondre. Nous étions certes convaincus de vouloir partir ,mais cela n'était pas si facile une fois le moment arrivé. Les yeux rivés sur moi, Alya me poussait à répondre. Je n'avais pas la force de le faire, j'étais déjà très fatigué, alors que le voyage et la vraie souffrance n'avaient même pas encore commencé. Nous étions là, encore pour quelques minutes, attendant Ahmed et espérant que cette attente dure une éternité. Ce qu'on ressentait était en effet très bizarre. On éprouvait des sentiments mitigés entre la soif de partir et l'envie de rester. Ahmed arriva et nous partîmes rapidement sans nous retourner, main dans la main. Nous avions seulement eu le droit d'emmener avec nous un petit sac où Alya avait mis quelques petites choses à manger pour la petite, elle qui était déjà affaiblie par la situation ou nous avions survécus ces derniers mois. On roula pendant de longues heures avant d'arriver à la cote turque ou tout allait commencé.
Une fois arrivés sur place,nous fumes surpris par le grand nombre de personnes qui allaient quitter cette terre en ce jour. Il faisait encore nuit et nous étions à peine capable de voir des ombres sans identifier aucun visage.Le silence régnait même ici, le départ n'était apparemment facile pour personne. On ne savait pas combien de temps il fallait attendre. Les embarcations qui allaient nous transporter vers Lesbos pouvaient arriver d'un moment à l'autre.Je commencai déjà à m'imaginer la vie qu'on pourrait avoir. Une vie paisible, loin de la guerre, loin de la mort. Les heures défilèrent, l'attente était longue. Mais cet espoir qu'on avait et qui illuminait nos yeux constituait notre force. On entendait des pleurs d'enfants qui s'éteignaient très rapidement. C'était probablement à cause de leur fatigue. Vers 6h du matin, les embarcations étaient enfin là. Tout le monde se précipitait pour monter, on était beaucoup trop nombreux et certains savaient déjà qu'ils allaient devoir attendre quelques heures voire quelques jours pour les prochaines embarcations. Nous nous sommes faufilés, Alya,Nour et moi et sommes montés à bord de la première barque. Les personnes arrivèrent de plus en plus et nous étions presque incapables de bouger mais personne n'osait le dire.
Nous nous éloignames petit à petit des cotes turques. Je sentais un déchirement et un vide me rongeait. Je ne saurais décrire ce que c'était mais je sentais une douleur que je ne pensais pas ressentir sur le coup. Pendant toutes ces semaines d'attente, je n'avais jamais cru que les adieux allaient être si durs. En effet, en quittant ce pays, on n' était plus personne. Nous n'étions plus que des réfugiés de guerre qui allaient demander l'asile. Des individus qui se perdaient dans un groupe.
Des individus à qui on a arraché l'identité.
La mer était si calme, mais d'immenses nuages couvraient le ciel. Les heures passèrent et on sentit une tempête arriver. Les vagues étaient devenues très hautes, très rapides. En pleine mer, avec un équipement de sauvetage défaillant, la panique commenca à se propager. La pluie commencait à tomber de plus en plus fort, les vents sifflaient, le tonner grondait. Tout le monde était prit de peur et panique. On ne savait pas quoi faire. L'homme qui s'occupait de guider la barque nous conseillait de garder notre calme et de nous mettre dans la partie ou ca bougeait le moins. Mais nous étions nombreux et l'instinct de survie commencait à se manifester chez chacun de nous. On avait presque envie de jeter les uns ou les autres en mer afin d'assurer la survie des notres. On priait dieu de nous aider. On entendait des cris provenants de tous les sens, je serrais Alya et Nour fort, très fort dans mes bras. On essayait de rester ensemble, comme nous nous l'avions promis chez nous, dans notre petite maison.
L'orage éclata, et en un bruit sourd, l'embarcation se renversa. Les plus faibles se perdirent dans cette mer méditerranéenne noire, si vaste. La plupart des réfugiés ne savaient pas nager, rare ceux qui avaient déjà vu la mer ou étaient déjà montés à bord d'un bateau. La majorité des victime du naufrage étaient des enfants et des femmes. On attendait les secours, on était très proche de l'ile grecque de Lesbos selon notre guide. L'eau était glaciale et certains se perdirent dans ses bras. Les bateaux de secours grecques avaient trop tardé, Alya qui serrait Nour dans ses bras la sentait déjà quitter ce monde où elle avait brièvement vécu. Elle criait son nom, fort et nos yeux se remplirent de larmes. Notre petit ange, notre bonheur, notre raison de vivre, celle pour qui nous étions prêts à tout sacrifier était partie. J'étais en colère contre moi même, j'étais perdu dans cette mer qui m'engloutissait. Dans mes bras, Alya pleurait la mort de notre enfant. Les noyers étaient de plus en plus nombreux et Alya finit par m'échapper afin de me quitter aussi. Ceci était arrivé si vite. Ma femme et ma fille étaient désormais toutes les deux parties. J'étais seul. J'avais déjà perdu mon seul frère pendant la guerre, mes parents étant décédés il y a bien longtemps, je n'avais plus au monde que ma femme et ma fille. Et ce soir je n'avais plus personne.
J'étais un des rares survivants qui furent sauvés par la marine grecque enfin arrivée. Mais il était désormais trop tard. Je n'arrivais pas à répondre aux questions qu'on me posait, j'étais tout simplement plongé dans un état de choc et refusait toute aide. Je voulais les rejoindre là ou elles étaient, honorer notre promesse, celle de toujours rester ensemble quoi qu'il arrive. Mais on m'obligea à monter a bord du bateau de sauvetage. Arrivé à Lebsos, je crie enfin. Je crie ma rage, je
ne savais pas à qui je devais en vouloir, à moi même? à elles qui étaient parties trop tot? à Dieu ? à Bachar El Assad? à la marine grecque? cela je l'ignorais. Je savais seulement que j'étais un homme plein de rage qui voulait venger la mort de sa famille. Je regardais autour de moi et me rendis compte que mon malheur n'était pas uniquement le mien. D'autres hommes et femmes avaient également perdu leur famille. Mais cela n'apaisait guère ma colère. Je ne voulais plus atteindre l'Europe. Pour quoi faire? celles pour qui j'étais prêt à travailler étaient parties. Je vis un corps d'enfant échoué sur la cote, et face à ce tableau cru j'avais juste envie de fuir. Je marchai pendant plusieurs heures, je me perdis dans une terre dont je ne savais rien. Je voulais juste m'éloigner. Et me voila aujourd'hui, même après des mois passés, toujours aussi seul et aussi perdu. 

BENNOUNA Salma – 1ereS1 

TEXTE 2.




Décédée, une mère syrienne laisse à sa fille une lettre qu’elle cacha pendant des décennies et dans laquelle elle lui explique tous les tourments qu’elles ont pu vivre avant leur arrivée sur la magnifique et accueillant Lesbos il y a de cela vingt cinq ans.
    
 Ô ma fille, c’est en versant de chaudes larmes que je m’efforce de t’écrire ces mots. Il va falloir que tu saches un jour où l’autre ce que moi, toi, ainsi que ton père avons enduré. Me remémorer tous ces faits ne me laisse guère indifférente, mais je dois le faire, je dois t’écrire ces quelques mots, pour que toi aussi, un jour, tu saches. Tu ne viens pas de nulle part, tes origines sont bien loin d’ici, au Moyen-Orient. La Syrie est ta terre natale. Tes racines ne sont guère ancrées dans cette belle terre méditerranéenne à la teinte brune. Oh non ! Celle-là a offert paix et prospérité à son peuple depuis des millénaires. En y pensant, la terre d’où tu viens n’est pas tellement différente. Sa teinte est plutôt ocre je dirais. Mais elle ne l’est en réalité plus, car elle fut abreuvée  par le sang des innocents. L’espoir a quitté cette terre depuis bien longtemps, depuis qu’un tyran sanguinaire s’est accaparé le pouvoir. Sans répit, il torture et méprise son peuple sans pitié. Il est tel une hydre à qui on couperait la tête, et qui reviendrait, infatigable et toujours plus violente pour tuer encore et encore. Cette malédiction n’a sans doute pas de fin, et nous sommes tous, chaque Syrien et Syrienne, dans un sombre précipice, dont la sortie à l’éclatante lumière blanche parait inaccessible. C’est ainsi que je devins apatride. Ce fut à cause de la folie meurtrière d’un sombre dictateur.
      Tu devineras qu’après avoir vécu les pires abominations, je devais naturellement te faire grandir dans un havre de paix. Il était impossible pour moi que la jeune pousse que tu étais croisse sur ces terres infertiles, souillées par le meurtre et le sang des innocents, où le droit à la vie est devenu un luxe ou un miracle. Mais ton père, grâce à Dieu, fut à mes côtés durant ces longues et douloureuses années. Sans lui, je serais morte et j’aurais brûlé sous le soleil ardent du Moyen-Orient, à n’en pas douter. Mais il a tout fait pour que sa famille soit en sécurité et que sa fille vive une vie heureuse, digne et honorable. Il voulait t’éloigner de cet enfer qui t’était destiné sous le joug du Monstre. Tu devais vivre une vie meilleure et profiter au mieux des beaux jours que t’offrait le Bon Dieu, car beaucoup de gens de notre entourage n’en eurent pas l’occasion malheureusement. Tel est le cas de ton jeune oncle qui est mort en combattant dans les rangs du front révolutionnaire syrien contre les troupes gouvernementales. Son grand frère est mort le premier en le protégeant de l’explosion d’un obus, en pleine rue à Dera. Sa sœur, elle, a tragiquement trouvé la mort à cause d’une balle perdue qui a transpercé son crâne, dans une ruelle d’Alep, où étaient perpétrés contre la population chaque année plusieurs attentats suicides à répétition. En y réfléchissant, ce sont bel et bien des rivières de sang qu’ont fait couler ces combats tant intenses que meurtriers. Moi, j’ai eu beaucoup plus de chance que lui car seul ton oncle Aziz fut pris au piège dans cet engrenage implacable. J’acceptai toutes ces morts avec une abnégation stoïque !                            Mais ma tragédie se déroula le jour où je perdis ton père. Aujourd’hui encore, je revois avec horreur son corps gisant sous les décombres.  Il est mort sous ce beau toit qu’il nous avait offert. Tout ce qu’il s’était acharné à construire durant sa vie se mua en sa propre tombe. Il fut écrasé par l’injustice, écrasé par l’oppression, écrasé par la résignation. Voyant ton père mourir sous les vestiges de notre vie, je ne l’ai pas supporté ! Anéantie, je n’avais plus qu’à fuir notre Paradis devenu Enfer.                   
      Cette fuite n’était pas un châtiment, puisqu’elle était salvatrice et m’a permis d’évoluer dans un monde où le désespoir et la misère étaient totalement bannis. J’ai défié les lois, les eaux, les tempêtes afin d’y arriver. Finalement, je me dis que j’ai fait le bon choix qui est celui de t’avoir offert une vie et un avenir, loin de l’atroce Guerre. Toutefois ce que je croyais être la fin de mes souffrances s’avérait, en fait, le début d’une Odyssée du Mal.  Je ne voudrais pas remuer le couteau dans la plaie qui saigne encore et encore, mais sache, ma fille, que mon odyssée fut l’épreuve la plus douloureuse de ma vie. Pressée de toute part par tous ces êtres que l’instinct de survie et l’espoir d’une vie meilleure rendaient acariâtres et sans pitié, ma seule priorité fut de te préserver et te garder en vie, je retenais donc le petit être que tu étais farouchement dans mes bras.
      Oh ! quels furent mon soulagement et ma joie quand je mis pied à terre, et quittai à jamais les lieux où fleurissaient les germes tant de la Haine que de la Guerre. La florissante Lesbos me souriait. C’est alors que mes yeux furent merveilleusement éblouis par la blancheur immaculée des maisons qui se dressaient tranquilles et avenantes tout au long de la baie. De nombreuses mouettes s’adonnaient à une danse harmonieuse et remplissaient le ciel de leur chant marin et mélodieux. A ce moment-là, une paix intérieure envahit tout mon être et je compris alors que cette terre allait t’offrir bonheur et sérénité.
      Tu comprends maintenant que même si nous aimons la terre qui t’abrite et me sert de tombeau et que nous l’adulons, elle n’est pas la nôtre. Tes racines sont ancrées bien loin d’ici, au Moyen-Orient. La Syrie est ta terre natale. Notre patrie a vu ses enfants fuir loin des horreurs de la guerre vers des lieux plus hospitaliers, a vu ses oiseaux quitter leurs nids vers des cieux plus verdoyants, a vu ses plaines et ses collines, semées de toutes parts de mines, se muer en champs de batailles. Les quatre cavaliers de l’apocalypse ont lancé leur assaut implacable sur ce pays. Mais toi ma fille, ne cultives pas de haine vis-à-vis de cette terre qui nous a refusé une vie paisible parmi les nôtres. Aime-la comme tu auras aimé ta terre d’accueil.                                                 
      Le petit oisillon est désormais un aigle royal qui porte sur ses ailes l’honorable responsabilité de retrouver la plaine qu’ont survolée  ses aïeuls avant lui. Il faudra que cela change. Ce cercle vicieux fait de haine et de mépris devra être brisé. La paix devra à nouveau être instaurée en Syrie. Qui sera à l’origine de ce changement ? Je ne sais. Peut-être que ce sera toi, en y pensant bien.
      Je n’ai rien à ajouter. Je t’ai dit tout ce que j’avais à dire. Tu connais désormais tout sur ton passé. Je t’ai toujours menti et je te demande de me pardonner. Délibérément, je t’ai éloignée de ce lourd et douloureux passé de mes propres mains, parce que je ne voulais pas t’impliquer dans tout cela. Mais maintenant, je pense que peut-être tu aurais pu changer la donne. Si je m’étais confiée à toi dès le début, et si je t’avais regardé droit dans les yeux et que je t’avais dit la vérité, je n’aurai alors pas eu à t’écrire ces mots. Te transmettre mes pensées d’en haut est un échec cuisant, alors maintenant, je voudrais te communiquer une vérité : Tu n’es surtout pas obligée de me pardonner, ma fille car où que tu sois et quoi que tu fasses, dorénavant, ma fille adorée, sache-le, je veillerai sur toi et je t’aimerai pour toujours, quoi qu’il arrive.

Haroun Bouchakor, 1ère S4

Ghita HAFFOU developpe deux idées (paragraphes argumentés) à partir du Lac de Musset. À vous de juger la qualité de son ecriture.

La nuit de décembre

LE POÈTE

Du temps que j'étais écolier,
Je restais un soir à veiller
Dans notre salle solitaire.
Devant ma table vint s'asseoir
Un pauvre enfant vêtu de noir,
Qui me ressemblait comme un frère.

Son visage était triste et beau :
A la lueur de mon flambeau,
Dans mon livre ouvert il vint lire.
Il pencha son front sur sa main,
Et resta jusqu'au lendemain,
Pensif, avec un doux sourire.

Comme j'allais avoir quinze ans
Je marchais un jour, à pas lents,
Dans un bois, sur une bruyère.
Au pied d'un arbre vint s'asseoir
Un jeune homme vêtu de noir,
Qui me ressemblait comme un frère.

Je lui demandai mon chemin ;
Il tenait un luth d'une main,
De l'autre un bouquet d'églantine.
Il me fit un salut d'ami,
Et, se détournant à demi,
Me montra du doigt la colline.

A l'âge où l'on croit à l'amour,
J'étais seul dans ma chambre un jour,
Pleurant ma première misère.
Au coin de mon feu vint s'asseoir
Un étranger vêtu de noir,
Qui me ressemblait comme un frère.

Il était morne et soucieux ;
D'une main il montrait les cieux,
Et de l'autre il tenait un glaive.
De ma peine il semblait souffrir,
Mais il ne poussa qu'un soupir,
Et s'évanouit comme un rêve.

A l'âge où l'on est libertin,
Pour boire un toast en un festin,
Un jour je soulevais mon verre.
En face de moi vint s'asseoir
Un convive vêtu de noir,
Qui me ressemblait comme un frère.

Il secouait sous son manteau
Un haillon de pourpre en lambeau,
Sur sa tête un myrte stérile.
Son bras maigre cherchait le mien,
Et mon verre, en touchant le sien,
Se brisa dans ma main débile.

Un an après, il était nuit ;
J'étais à genoux près du lit
Où venait de mourir mon père.
Au chevet du lit vint s'asseoir
Un orphelin vêtu de noir,
Qui me ressemblait comme un frère.

Ses yeux étaient noyés de pleurs ;
Comme les anges de douleurs,
Il était couronné d'épine ;
Son luth à terre était gisant,
Sa pourpre de couleur de sang,
Et son glaive dans sa poitrine.

Je m'en suis si bien souvenu,
Que je l'ai toujours reconnu
A tous les instants de ma vie.
C'est une étrange vision,
Et cependant, ange ou démon,
J'ai vu partout cette ombre amie.


Ce poème de Musset évoque le temps. On peut remarquer avant tout une certaine régularité du temps et une progression stable au niveau de la structure du poème En effet, toutes les strophes sont composées de six vers, soit des sixains, la structure des rimes est identique dans chaque strophe, les rimes sont sous la forme aabccb et finalement au niveau du mètre, on retrouve des vers de huit syllabes, soit des octosyllabes. Ainsi, cette progression stable nous amène par la suite après analyse à une progression du temps qui semble marquer les étapes de la journée, en effet en relevant le champs lexical du temps nous retrouvons : «un soir» (v.2) et «un jour» (v.14). Par la suite on aperçoit les différentes étapes de la vie et ce à travers des compléments circonstanciels : «du temps que j’étais écolier» (v.1), «comme j’allais avoir quinze ans» (v.13), «à l’âge où l’on croit à l’amour» (v.25), «à l’âge où l’on est libertin» (v.37). Tous ces compléments circonstanciels se réfère à une période de la vie. On peut remarquer une chronologie, celle de l’enfance à l’âge adulte. 

Nous pouvons également remarquer la présence du reflet de soi même. Premièrement, nous pouvons le voir à travers le champs lexical de la perception et du regard : «ressemblait» (v.6), «montra» (v.24), «montrait» (v.32), «semblait» (v.34), «ressemblait» (v.42), «cherchait» (v.46). Deuxièmement, nous remarquons de nouvelles identités en parallèle à celles de l’auteur et ce grâce à des adjectifs  qualificatifs et attributs : «un pauvre homme» (v.5), «un jeune homme» (v.17), «un étranger» (v.29), «un convive» (v.41. On peut penser qu’il existe un lien entre ces identités et les différentes étapes de la vie dans les quatre premières strophes. Nous pouvons mettre en relation «écolier» (v.1) et «pauvre enfant» (v.5). En effet, la période de l’enfance correspond à celle où l’on va à l’école et que l’on est donc écolier. On peut également mettre en relation «j’allais avoir quinze ans» (v.13) et «un jeune homme» (v.17) car l’âge de quinze ans correspond à l’adolescence et l’âge où l’on traite les adolescents de jeune homme. Dans les quatre dernières strophes on ne retrouve aucun lien entre les étapes de la vie et les identités trouvées. 

Ghita HAFFOU, 2de 5.